mercredi 11 novembre 2009

Claude Chabrol se met à table

Claude Chabrol, aussi célèbre pour son amour immodéré de la bonne chère que pour le 7e art, s’apprête à publier une étude de 57 films.

Côté cuisine, Chabrol se met à table (en collaboration avec Laurent Bourdon). Du Beau Serge (1959) à Bellamy (2009), il s’agit d’une fiche technique, bien sûr, mais aussi d’un décryptage où il est question de nourriture, de cuisine.

Claude Chabrol se met a table

Ainsi, cet ouvrage propose les vraies recettes de ces films : Charles Denner râlant devant son hachis parmentier dans Landru, Michel Serrault reprenant du fricandeau à l’oseille dans Le Fantôme du chapelier, Jacques Dutronc coupant un rôti de veau dans Merci pour le chocolat, Gérard Depardieu dévorant une pintade aux choux dans Bellamy.

Parmi ces cinquante années de balades gourmandes sur grand écran, vous n’aurez que l’embarras du choix ! Le ragoût de bœuf concocté par Jean Yanne dans Que la bête meure, les écrevisses à la nage servies dans une des scènes de La Décade prodigieuse avec Orson Welles, L’Inspecteur Lavardin, incarné par le très gourmet Jean Poiret qui a une prédilection pour le poulet au vinaigre... Cela ne fait aucun doute, en parcourant cet ouvrage, l’appétit vient en lisant.

Claude Chabrol se met a table
« C’est tout simple : si les personnages de mes films ne mangent pas... Ils meurent ! » C’est dire l’importance de la nourriture dans les films de Claude Chabrol. Ainsi, après des livres comme 'La sauce était presque parfaite, 80 recettes d'après Alfred Hitchcock' ou encore 'Crèmes et châtiments, recettes délicieuses et criminelles d’Agatha Christie', vous allez pouvoir découvrir Chabrol se met à table, livre qui décortique la filmo - et les recettes du réalisateur de Poulet Au Vinaigre ! Un bouquin ma foi bien succulent, qui ravira les amateurs d’un réalisateur qui aime la bonne bouffe. 57 films... 25 recettes... 192 pages à déguster avec attention. Car comme le précise l’auteur, Laurent Bourdon, il est difficile de mentir la bouche pleine...

Préfacé par Jean-Luc Petitrenaud, connu pour ses escapades gourmandes sur France 5, suivi d’une interview (trop courte !) du cinéaste, le livre nous propose ensuite des fiches très détaillées (et chronologiques) sur chaque film de Chabrol. Du célèbre Le Beau Serge à Bellamy en passant évidemment par Landru, Les Fantômes Du Chapelier ou encore La Fleur Du Mal, chaque film se voit joliment résumé et complété par une sous-rubrique « making of », bourrée d’anecdotes pétillantes entourant les acteurs, le tournage ou l’historique du film. Evidemment, il y est aussi question de ripailles : « à table » nous retrace en quelques lignes les repas partagés par les personnages...

Sans oublier une bonne idée qui va ravir nos papilles : l’heure de l’apparition du cinéaste, qui se cache comme vous le savez, dans chacun de ses films. Comme un certain Alfred Hitchcock... D’ailleurs avant Chabrol se met à table, Laurent Bourdon nous concotait déjà Le dictionnaire Hitchcock, qui classait par ordre alphabétique toute chose ayant un rapport de près ou de loin avec l'immense réalisateur de Psychose.

Aujourd’hui, Laurent Bourdon offre une nouvelle fois une manière très originale de parler d’un cinéaste qu’il adore. La mise en page est très aérée, joliment imagée, ponctuée de sigles bien identifiables pour différencier les sous-rubriques, ce qui en fait une balade gourmande facile à lire et très agréable à feuilleter.

Enfin, dernière chose, et pas des moindres : on trouve à la fin du livre 25 recettes pour réaliser et déguster le vrai plat des films ! Le hachis parmentier de Landru, la tarte aux pommes de Madame Bovary, le poulet au vinaigre de l’Inspecteur Lavardin ou encore la pintade au choux de Bellamy... Vous m’en direz des nouvelles. Chabrol se met à table, un livre délicieux à consommer sans modération... Et souvenez-vous, ici la gourmandise n’est pas un vilain défaut.

Claude Chabrol se met a table


"La différence entre le gourmet et le gourmand me fait bien rigoler, il faut savoir être les deux!", affirmait Claude Chabrol selon lequel "manger et travailler bien, c'était la même chose".

"Le repas est un des rares moments où un être humain n'est pas tout à fait le même au début et à la fin. Si on fait la bonne addition ou la bonne soustraction, on arrive à comprendre les gens. A partir de là, c'est plus facile de travailler avec eux", ajoutait celui qui avait participé en 2004 à Dijon au premier festival "Cinéma et Gastronomie".

Il se faisait un point d'honneur à bien nourrir ses acteurs: "Avant le tournage, je fais un repas avec eux pour voir si je ne me suis pas trompé". A la fin, il régalait l'équipe de petits plats et de bons vins.

Claude Chabrol, qui a longtemps vécu en Anjou, ne cachait pas que, s'il hésitait entre deux lieux de tournage, il choisissait en fonction des restaurants du lieu: "Ce serait crétin de ne pas retenir celui où on mange le mieux, non?".

Dans les années 50, "je pouvais manger une oie entière, douze tranches de rôti de veau, ce genre de performance dont j'étais très fier", avait-il dit à Libération en 2001.
Il se moquait volontiers de ses camarades de la Nouvelle Vague, plus austères que lui, qui mangeaient tellement mal. Une fois, il avait invité François Truffaut à se délecter d'un foie gras. "Pas mal, ton pâté...", avait commenté ce dernier. Mine affligée de Chabrol.
Avec son scénariste fétiche, Paul Gégauff, excellent cuisinier amateur qui devait finir poignardé par sa femme, il s'amusait à inventer des recettes ou à remettre au goût du jour des recettes anciennes: "Je me rappele une nuit entière à éplucher des noisettes pour refaire un plat de François Ier".

En 1997, à Paris-Match, il indiquait que son plat préféré était la sole que préparait sa femme avec "cuisson à sec, à la seconde près", ainsi que le gibier, surtout le chevreau. En matière de vins, ses goûts étaient très classiques: grands bordeaux et bourgognes.
Amusée, la critique avait l'habitude d'écrire que, par exemple, "au guide Michelin, son film aurait obtenu sa troisième étoile" ou alors que son histoire était "bien mitonnée". "Rôtisseur lui-même, il surveille avec autant d'amour la cuisson des volailles que la confection d'un long métrage", avait écrit Philippe Bouvard.

Evidemment, avec l'âge et quelques alertes médicales, il devait ces dernières années se surveiller un peu et consommer, notamment, moins de chocolat.